Rédigé par Jean Decorps PRÉSIDENT ABSAROKA FRANCE ET ABSAROKA QUÉBEC
QUELS SONT LES POINTS À VÉRIFIER AVANT D’EXPORTER EN FRANCE ET PLUS GÉNÉRALEMENT EN EUROPE ?
La France est le 2e pays de l’Union européenne pour le PIB, la population et le nombre de brevets déposés par an : c’est donc un acteur important pour toute exportation sur le continent européen.
Tout d’abord, il faut considérer la PI avant toute action : vente, salon, congrès, conférence, ouverture d’un établissement secondaire, partenariat avec une entreprise française, européenne, avec un organisme de recherche, discussion avec un distributeur ainsi qu’avant la mise en vente, y compris via Internet si les produits peuvent être commandés à partir de la France.
Le but est de sécuriser et de valoriser vos innovations et vos échanges tout en communiquant sur vos produits.
La propriété industrielle (PI) est régie par des règles internationales, nationales ou régionales. En France et en Europe, il existe des titres nationaux et régionaux : le brevet européen, qui couvre 39 états en Europe, la marque communautaire et le modèle communautaire qui s’appliquent sur les 26 états de l’Union européenne. Tous les pays de l’Union européenne sont considérés comme une seule entité pour la marque ou le modèle communautaire. Pour le brevet européen, on peut choisir le nombre d’états parmi les 39 états.
Le brevet unitaire (BU) est entré en vigueur le 1er juin 2023 en même temps que la Juridiction Unifiée des Brevets (JUB). Le BU permettra de designer solidairement un groupe de 17 pays de l’Union européenne. La JUB aura compétence pour traiter tout litige relatif à un brevet européen ou à un brevet unitaire.
QUELLES SONT LES ACTIONS OFFENSIVES ET DÉFENSIVES À ENVISAGER ?
Ce sont souvent les mêmes. Il faut bâtir une stratégie, avec divers scénarios.
Il faut vérifier si des concurrents ou partenaires existent en France et surtout leur attitude en matière de PI (est-ce qu’ils ont tendance à négocier ou non, ont-ils des titres de PI, une présence au Canada…).
Il faut vérifier si des titres de PI en vigueur en France peuvent être opposés à votre produit.
Il faut vérifier si ce qui sera divulgué ou commercialisé à l’export est protégé, sinon est- ce protégeable ?
Qu’est-ce que l’on peut accepter et négocier ?
Dans tous les cas, prendre toujours date de la création (notaire, cahiers de laboratoire…) et, si cela est possible, déposer un titre de PI.
Se préparer à agir ou à subir une action en contrefaçon.
Y A-T-IL DES PARTICULARITÉS FRANÇAISES EN MATIÈRE DE CONTREFAÇON ?
Oui, en France il existe la saisie-contrefaçon, utilisée dans environ 80 % des actions en contrefaçon, cela représente plus de 1 200 saisies par an. Il s’agit, pour le titulaire du titre de PI, de collecter lui- même la preuve de la contrefaçon et son étendue. Pour cela, il est autorisé par ordonnance à collecter en tout lieu et par tout moyen les éléments de preuve, cela auprès du fabricant, importateur, distributeur, utilisateur ou sur un salon. Il ne s’agit pas de saisir tous les objets contre- faits ni de faire cesser la contrefaçon, mais de récupérer les preuves, pour une future action en justice.
Le titulaire n’agit pas lui-même, mais c’est son Conseil en PI et un huissier qui agissent, avec l’assistance de la force publique et de spécialistes (informaticien, photographe, serrurier…)si besoin. On collecte uniquement la preuve de la contrefaçon en préservant les secrets industriels du contrefacteur.
C’est une procédure très invasive, puisqu’il n’est pas possible de s’opposer à la collecte de la preuve.
Il s’agit d’une procédure ex parte, avec un effet de surprise essentiel, spécifique et dérogatoire du droit commun. Elle est donc très encadrée, avec des règles très précises pour éviter tout dérapage.
Il faut donc bien préparer sa saisie et/ou se préparer à en subir une, en appréciant les risques de contrefaçon.
En complément, il existe une autre mesure : la retenue en douane, à toutes les frontières de l’Union européenne, d’un produit estimé contrefaisant. La retenue en douane est une détention provisoire, un peu comme une garde à vue pour les personnes.
Il existe donc en France des mesures spécifiques pour préserver les droits liés à un titre de PI ; il convient de les connaitre avant toute exportation.